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Innovation agricole: l’intégralité de l’entretien avec M. Mamadou Sall, fondateur de la plateforme BAYSEDDO 2.0

BAYSEDDO

De passage dans les locaux du Journal Universitaire il y’a de cela quelques semaines, le fondateur de la plateforme agricole BAYSEDDO 2.0 (cultiver et partager en wolof) Monsieur Mamadou Sall revenait entre autres à travers une interview qu’il a accordé à notre organe, sur les grandes innovations apportées par cet outil numérique dans le domaine de l’agriculture. Dans cet article ci-après, nous mettons à votre disposition l’intégralité de l’entretien avec M. Mamadou Sall, initiateur de cette innovation numérique.

Journal U : Bonjour, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs s’il vous plaît ?

Mamadou Sall  « Je réponds au nom de Mamadou Sall, fondateur de l’initiative BAYSEDDO 2.0 dans le domaine de l’agro-business ».

Journal U : Pouvez-vous nous faire une présentation de votre plateforme après nous avoir dit les raisons qui vous ont poussé à mettre au point cette initiative ?

Mamadou Sall  « BAYSEDDO est une plateforme qui met en relation des agriculteurs qui ont des terres et qui n’ont pas accès aux financements avec des particuliers qui veulent investir dans l’agriculture en achetant des parts dans une exploitation agricole à durée déterminée. Le constat qu’on a eu à faire c’est qu’en Afrique on retrouve plus de 60% des terres qui sont inexploitées, donc l’Afrique est appelée à nourrir le monde. Beaucoup de nos parents agriculteurs ont des terres mais n’ont pas les moyens de les exploiter. De l’autre côté on voit des sénégalais qui sont à Dakar, des sénégalais de la classe moyenne mais aussi des sénégalais de la Diaspora qui veulent investir au pays plus précisément dans l’agriculture mais ne savent pas par où passer. C’est de là que nous ait venu l’idée de connecter ces deux mondes en l’occurrence le monde rural et les gens qui sont au niveau des villes et ceux de la Diaspora pour pouvoir investir dans leurs localités d’origine ou dans les villages auprès des agriculteurs partenaires. Je tiens à rappeler aussi que c’est quelque chose qui se faisait traditionnellement dans nos villages d’origine notamment au Fouta. Ceux qui sont « Halpular » comprendront par BAYSEDDO le terme « réémm péétièènn ». C’est ce qu’on a voulu modernisé en utilisant le numérique par la création d’une bourse agricole pour connecter ces deux mondes ».

Journal U : Pourquoi le choix de l’agriculture parmi tous les secteurs d’activités ?

Mamadou Sall « Le choix de l’agriculture comme on a l’habitude de le dire c’est qu’en Afrique, plus particulièrement  dans les pays francophones on a sauté certaines étapes c’est-à-dire on est parti très tôt sur le secteur tertiaire notamment le secteur des services. Donc on a raté quelque chose pour voir le développement des services. Et toutes ces grandes nations qui se sont développées et qui ont un secteur tertiaire fort, sachez aussi qu’elles ont un secteur primaire et secondaire très fort. Et nous avons mis la charrue avant les bœufs. Il va falloir qu’on développe le secteur primaire d’abord et celui-ci servira de « input » pour le secteur tertiaire et le secteur secondaire. Donc globalement c’est ce qui nous a motivé à nous focaliser sur l’agriculture qui est un secteur rappelons le, pourvoyeur d’emploi. Il y’a lieu également de rappeler qu’au Sénégal plus de 60% de la population active vive en zone rurale d’où la nécessité de développer l’agriculture. Et c’est un peu triste comme je le dis d’habitude, à l’étranger lorsqu’on quitte une ville pour aller à une autre  on constate le long de la route que tout est vert alors quand on vient au Sénégal et qu’on quitte Dakar pour aller à l’intérieur du pays on voit des hectares et des hectares à perte de vue qui sont inexploités. Et on nous parle de pauvreté, de famine, c’est inadmissible.»

Journal U : Quelques sont les innovations majeures apportées par votre plateforme ?

Mamadou Sall « Les innovations majeures c’est l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication. Cet outil magique qui permet de connecter ces deux mondes comme je l’ai rappelé tantôt. Auparavant il y’avait ces agriculteurs qui restaient dans leurs villages et faisaient le BAYSEDDO traditionnellement. Quelqu’un amenait des semences, d’autres de l’engrais, ensemble, ils cultivaient et se le partageaient. Sur ce, on s’est rendu compte que le numérique pouvait nous permettre de lancer cela à grande échelle. Je peux prendre l’exemple d’un village au Fouta ou de la ville de Podor par exemple où il y’a pas mal de personnes qui sont à l’étranger qui se sont constituées en association. Elles peuvent investir dans leurs localités d’origine en créant de l’emploi et de la valeur ajoutée aidant ainsi les agriculteurs en leur octroyant un financement. Et derrière tout cela, il y’a un  système de partage des revenus. Au final, tout le monde y gagne, que cela soit les agriculteurs ou les investisseurs. Et nous en tant que plateforme, nous assurons la mise en relation et le suivi des exploitations agricoles.»

Journal U : Avez-vous rencontré des difficultés en mettant en œuvre cette initiative ? Si oui de quelles natures ?

Mamadou Sall « Comme dans toutes aventures entrepreneuriales, les difficultés, il y’en aura toujours mais on a l’habitude de le dire ce n’est pas le chemin qui est difficile mais difficile est le chemin. Il faut prier quand même pour qu’il ait des difficultés parce que c’est elles qui nous permettent davantage d’innover, de nous développer, de nous dépasser, de nous surpasser.

Certes je suis à Dakar mais le gros du travail c’est sur le terrain et la grande partie de notre équipe y est également notamment à Saint-Louis et Richard Toll pour faire le suivi des exploitations agricoles. Et j’avoue que le suivi est un maillon important donc il faut que les gens soient présents sur le terrain pour suivre l’évolution du projet ».

Journal U : Depuis le lancement de votre plateforme, quelle a été la réaction et l’implication des investisseurs, des agriculteurs, si on sait que ces derniers n’ont pas un niveau d’étude très poussé ?

Mamadou Sall « On est parti à leurs contacts notamment les agriculteurs et j’avoue que beaucoup d’entre eux sont open par rapport à cette innovation. Actuellement on est sur plus de 18 hectares en partenariat avec des agriculteurs dans la zone nord du pays notamment à Saint-Louis et Richard Toll. Et on envisage d’aller plus loin puisqu’on a investi plus de 60 millions dans des exploitations agricoles et actuellement on est en train de voir comment travailler au service d’un mouvement paysan, la CNCA en l’occurrence qui regroupe tous les producteurs au niveau national. On parle d’autosuffisance alimentaire en riz, on parle d’arachide, d’oignons, de pomme de terre et l’idée c’est vraiment de s’appuyer sur les paysans, les exploitations familiales afin qu’on puisse développer l’agriculture au Sénégal.»

Journal U : Dans un monde de plus en plus dominé par les TIC, quelle doit être la place de celle-ci dans l’agriculture ?

Mamadou Sall « Pour moi les TIC c’est un outil transversal qui peut être au service de la santé, de l’agriculture, de la pêche, de l’élevage, du commerce, de la banque quand on voit la révolution avec les FINTECH donc je me dis que les TIC interviennent dans tous les secteurs d’activités. Elles permettent de gagner en efficacité, en efficience d’où la nécessité de les utiliser pour développer les entreprises. Dans le monde rural par exemple, on parle de l’utilisation des TIC, quel impact cela pourrait avoir ? Je prends l’exemple d’un agriculteur qui a ses produits agricoles au niveau de son champ et qui peine à les commercialiser. Aujourd’hui, l’outil numérique permet à cet agriculteur de pouvoir vendre ses produits à quelqu’un qui est à Dakar. Donc quelqu’un à Dakar peut, directement à travers une plateforme, se connecter et avoir une idée des prix. L’agriculteur peut également avoir une idée des prix sur les marchés c’est-à-dire de savoir le prix de vente d’un produit sur tel ou tel marché à l’instar du kilogramme d’arachide. C’est des outils que l’on considère comme étant trop  » « high level » hors que non. Moi je me dis que c’est quelque chose qui est facile d’utilisation et tous les agriculteurs dont on croit qu’ils ne savent pas utiliser le numérique, ont et savent manipuler le téléphone portable. Et il y’a des applications qui sont développées, « designées » de telles sortes qu’elles soient accessibles aux agriculteurs. Actuellement quand on part au Fouta, tous ces jeunes qui sont là-bas ont Facebook et WhatsApp. Et ceux sont ces jeunes qui vont prendre le relais au niveau de ces communautés puis-qu’étant déjà initiés à l’outil numérique.»

Journal U : Dans un contexte où on demande aux jeunes de retourner à la terre, quel est le message que vous leurs lancez ?

Mamadou Sall « Je pense qu’il suffit juste d’y croire c’est-à-dire qu’il n’y’a pas de sot métier et l’agriculture pour moi c’est un gros business très lucratif. Il y’a un rapport qui a été récemment publié qui montre que parmi les dix secteurs prometteurs en Afrique pour les trente prochaines années, l’agro-business figure parmi les trois premiers d’où la nécessité de lancer un appel à ces jeunes de retourner à la terre. Maintenant retourner à la terre ne veut pas dire qu’on doit y retourner avec la houe ou la daba. L’agriculture est tellement moderne puis-qu’actuellement on parle d’agriculture de précision, l’utilisation des objets connectés, des drones, etc. Donc tous cela c’est l’outil numérique qui le permet, il va falloir qu’on essaye de rendre l’agriculture « sexy » pour pouvoir inciter ces jeunes à retourner à la terre et de leurs montrer que c’est possible de réussir sa vie dans l’agriculture. Ailleurs on voit des « agri-preneurs » qui ont réussi et quand on part aux États-Unis notamment au niveau de la région de Californie où moi quand j’y allais je croyais que cette région se limiter juste à la Sillicon Valley et que le numérique y était le socle de l’économie, je me suis rendu compte que c’est la Californie en réalité qui nourrit les États-Unis. C’est une région agricole par excellence. Donc il faut croire à l’agriculture, il faut avoir de la patience par rapport à cela et se lancer. A mes camarades jeunes, ils n’ont qu’à y croire et se lancer puisqu’ il y’a beaucoup de métiers dans la chaine de valeur agricole. C’est-à-dire l’agriculture ne se limite pas juste à la production mais il y’a la transformation des produits agricoles, la commercialisation, etc. Aujourd’hui on voit une prolifération de plateformes de E-commerce agricole qui vendent juste des produits agricoles donc ce sont des canaux que les jeunes peuvent  utiliser et exploiter et cela permet de créer de la valeur mais aussi de l’emploi.»

 

Journal U : Pouvez-vous nous parler de l’importance et de l’avenir des Start-up dans le secteur socio-économique notamment en ce qui concerne la problématique de l’emploi des jeunes ?

Mamadou Sall « Il y’a un écosystème numérique en plein balbutiement et j’avoue il y’a de cela deux ans c’était encore timide mais là quand même on note une effervescence de start-up dans différents domaines que cela soit dans la santé, dans l’agriculture, dans le e-commerce, dans la finance, dans tous les secteurs d’activités. Donc il va falloir inciter les jeunes à bas âge, au niveau des universités à créer leur propre emploi. Tout le monde ne peut pas devenir entrepreneur qui n’est pas une chose aisée aussi, parce que c’est bien beau de dire que je suis entrepreneur mais j’avoue qu’il va falloir vraiment….., je ne veux pas utiliser certains mots mais quand même cela nécessite du courage, de la patience. Pour être entrepreneur, il faut être passionné, il faut être persévérant. Du jour au lendemain tu peux te casser les bras et derrière il y’a personne pour aider mais pour moi la seule chose qui importe c’est d’y croire fortement et avec beaucoup de conviction surtout. L’écosystème du numérique est là c’est à nous maintenant de construire notre propre écosystème, c’est à nous de donner du sens à cet écosystème. C’est à nous aussi de nous organiser, de nous entre aider, entre jeunes, entre « Start-upeurs » et d’ailleurs on a même initié un patronat du numérique au Sénégal qui regroupe les différents entrepreneurs dans ce domaine. L’idée c’est vraiment de pouvoir permettre à d’autres jeunes qui ont des idées de projet de rejoindre cette association pour échanger avec d’autres qui ont déjà démarré quelque chose ou qui sont en train d’exécuter leur projet sur le terrain. »

Written by Abdourahmane

Je suis Diplômé en Aménagement et Gestion Urbaine en Afrique, Spécialiste en économie urbaine en même tant Reporter et Éditeur au Journal Universitaire. Je suis également un passionné des TIC.

2 Comments

  1. Vraiment votre initiative a beaucoup de valeurs. On peut y parvenir si on a croie. Comment peut-on y intégrer?

  2. Slu belle initiative très riche en matière de connaissance.vraiment on aime les jeunes ambitieux comme vous.maintenant comment faire pour vous rejoindre?

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